Lors d’une séance de coaching, Sophie me raconte son histoire.
Elle n’est pas bien.
Elle a vécu il y a deux ans une situation de harcèlement dont elle a du mal à se relever.
Aujourd’hui, elle a changé de poste et de manager, et a quitté cet environnement malsain, mais continue à ne pas être bien.
En discutant avec elle, nous essayons de dénouer comment sortir de son mal-être.
Elle me raconte alors comment cela s’est passé pour elle.
Elle détaille comment elle a vécu les relations avec son manager, ses attitudes, et son incapacité à réagir face à cette situation.
Elle me raconte qu’elle a souffert sans vraiment s’en rendre compte pendant 2 ans.
Il a fallu que l’une de ses collègues rentre d’un congé maladie de longue durée pour lui ouvrir les yeux. De son œil extérieur, celle-ci met en évidence les comportements intolérables de ce hiérarchique et l’impact qu’ils ont sur Sophie.
Ce n’est qu’à ce moment là que Sophie se met à réagir, à s’opposer, à refuser, à alerter les RH… et finit par sortir de ce contexte en trouvant un poste dans une autre agence, plus loin de chez elle mais plus sereine.
À force d’en parler, elle identifie que ce qu’elle vit mal aujourd’hui : c’est surtout qu’elle s’en veut de ne pas avoir réagi plus tôt face à la situation. Elle culpabilise.
« Comment c’est possible : je me suis laissé faire, je suis resté en position de victime !!! ».
Elle me raconte qu’à côté de ça, lorsque le cancer de son mari a été diagnostiqué, elle a su faire face.
Elle l’a soutenu, encouragé, géré les enfants, tant matériellement que psychologiquement.
Et pourtant, cette même femme qui a fait preuve d’autant de courage et de détermination dans cette situation, s’est laissée faire face à ce manager sans réagir. « Pourquoi ?!? »
Elle s’en veut et finit par douter d’elle.
La grenouille dans la marmite
Afin de lui faire prendre du recul, je lui raconte cette expérience.
(Olivier Clerc, écrivain et philosophe : La grenouille qui ne savait pas qu’elle était cuite… et autres leçons de vie)
Prenez une grenouille. Plongez-la dans une marmite d’eau bouillante :
La grenouille réagit, se débat comme un diable. Tant et si bien qu’elle saute et quitte cet environnement hostile.
Maintenant, prenez une autre grenouille (et oui, la première n’est pas bête, elle connaît le truc ).
Mettez là dans une marmite d’eau à température ambiante. La grenouille se sent bien et ne bouge pas.
Faites chauffer à feu très doux.
L’eau se réchauffe doucement. La grenouille d’ailleurs se trouve bien. Son environnement devient plus agréable, elle se détend, se sent en confort.
Augmentez progressivement la température.
L’eau continue à se réchauffer doucement. La grenouille sent les différentes étapes. De bien, elle devient léthargique. La chaleur l’endort, l’engourdit. Mais pour l’instant, ce n’est pas forcément désagréable. Elle se laisse aller.
L ‘eau continue à chauffer.
Là, cela devient désagréable. La grenouille le sent, mais sa léthargie devient plus profonde. Elle a du mal à se mouvoir, ankylosée par la chaleur.
Jusqu’à ce que l’eau se mette à bouillir et cuise la grenouille qui meurt sans avoir réagi.
Métaphore et coaching
J’en parlais déjà ici.
Lors de la séance, nous avons donc travaillé sur cette métaphore, en lui demandant les parallèles avec son histoire.
Lors de la maladie de son mari, l’annonce brutale l’a amenée à se comporter comme la grenouille qu’on ébouillante tout de suite. Le choc l’a poussé à prendre les choses en main tout de suite.
Avec son manager, la situation et le malaise se sont construits progressivement, l’eau a chauffé doucement. Elle comprend mieux pourquoi elle n’a pas réagi.
Elle identifie même les périodes où elle a apprécié son manager, qui faisait tout pour qu’elle se sente bien. « En fait, il venait juste de mettre l’eau à chauffer » me dit-elle.
Finalement, l’arrivée de sa collègue a déclenché sa prise de conscience. C’est comme si cette personne était arrivée dans une marmite en train de bouillir, et qu’elle l’avait réveillé en lui disant : « Eh cocotte : réveille toi, sinon tu es cuite !!! »
Eh oui, l’intervention extérieur lui a été salvatrice, car cela l’a sortie de sa léthargie !
A l’issue de son coaching, Sophie comprend mieux comment elle en est arrivé là.
Je ne mentirai pas. Ce n’est pas en une seule séance qu’elle a arrêté de culpabiliser. Mais elle identifie mieux le mécanisme.
Sa crainte étant de revivre ce genre de situation, elle a pris la décision de faire des breaks réguliers avec un objectif : prendre plus souvent la température de son eau afin de réagir au plus vite. Pour elle, cela passe, lors de ses vacances, par une analyse factuelle de sn environnement de travail : ce qui lui convient, ce qui lui convient moins…. En se faisant des plans d’action pour se positionner plus clairement en cas d’insatisfaction.
Et vous, comment est l’eau de votre marmite ? que faites vous pour vérifier que la température vous convient ?
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