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Somme d’individus ou équipe haut potentiel (1), les différents stades de la construction d’une équipe

Laissez moi vous parler d’un homme: Kurt Lewin.D’origine juive allemande, il immigre en 1933 aux USA lors de la montée du nazisme, et cherche à comprendre comment un peuple pouvait se laisser embarquer dans une idéologie.

Il étudie alors les fonctionnements des groupes et en déduit entre autre la «dynamique des groupes».

Une expérience en particulier illustre la base de ses travaux.

En 1943, l’Amérique est engagée dans la guerre. Il s’agit de favoriser la consommation des abats dans les ménages américains. (beurk!!!).

Dans 3 groupes, les enjeux, les avantages économiques et diététiques de cette consommation sont présentés aux volontaires.

Dans 3 autres groupes, les femmes discutent librement entre elles de leur aversion pour cet aliment, de leurs freins, de leurs habitudes alimentaires. Rapidement, elles demandent l’avis d’un expert pour avoir des recettes pour préparer des plats.

Elles décident par vote collectif de servir des abats.

Dans le premier panel, le passage à l’acte est  quasi nul.

Dans le second panel, 30% des participantes tiendront cette promesse faite en collectif.

Il démontre par là qu’une décision prise en groupe a plus d’impact qu’une décision individuelle. 

On en vient donc à la notion de groupe. Mais quand ce groupe doit travailler ensemble, est-ce suffisant?

C’est le point de départ de la «dynamique de groupe».

D’autres, comme Katzenbach et Smith, ont eu l’occasion d’identifier ensuite les différents niveaux d’équipe, distinguant ainsi les «pseudo équipes», les «équipes authentiques», et les «équipes excellentes».

3 niveaux, répartis (en fonction des modélisations) en 5 niveaux.

La collection d’individus

Imaginez arriver dans une salle pleine d’inconnus, autour d’un sujet qui vous rassemble.

Certes, le thème vous intéresse, mais combien parmi vous serait prêt à livrer ce qu’il a sur le coeur, ses états d’âmes… Dès le premier instant.

Il en est ainsi de la collection d’individus.

Dans ce collectif, la réussite individuelle prime sur la réussite collective.

Chacun vient y chercher un intérêt personnel.

Lorsque les personnes doivent travailler ensemble, elles adoptent donc une approche linéaire des problèmes, avec la conviction que si chacun fait bien son travail, alors le collectif ira bien.

Les personnes sont peu mobilisées, tant sur le plan humain qu’opérationnel: protection, méfiance, peu de communication.

Les conséquences sont le manque de réactivité et de prise d’initiative.

J’ai pu ainsi trouver ce mode de fonctionnement dans certaines équipes de commerciaux, fortement impliqués dans leurs objectifs individuels. Avec des réflexions allant jusqu’à «je ne dis pas trop ce que je fais avec mes clients, certains de mes collègues pourraient me piquer mes idées».

Le groupe

Il partage un objectif commun, porté et véhiculé par le manager.

La notion d’appartenance est présente, et le groupe se centre sur une résolution technique des problèmes et des situations.

Bref, quand il y a un problème, on applique ou on créé une procédure.

Une dimension relationnelle, voire affective commence à émerger au fur et à mesure des interactions.

La performance individuelle persiste. L’intérêt d’être en groupe réside surtout dans le plaisir d’être ensemble, plus que le désir de réaliser des tâches ensemble.

Le manager est le leader, il impulse l’énergie et les directives au groupe.

Les moments collectifs sont destinés à répartir les tâches entre les membres, qui les réalisent chacun de leur côté à l’issue.

Ce qui me rappelle une grande discussion entre 2 membres d’une entreprise, sur leurs attentes quant à «l’esprit d’équipe» prôné dans les valeurs d’entreprise.

Alors que le premier se plaint d’un manque d’entraide au sein de l’équipe, le second lui répond du fond du coeur: «moi, je trouve que ça va, il y a une bonne ambiance».

L’équipe potentielle

Cette phase n’est qu’une étape transitoire entre le groupe et l’équipe. Parfois chaotique, car de nouveaux mode de fonctionnement se dessinent naturellement et progressivement, de façon empirique.

Un objectif commun et partagé se concrétise, les membres de cette équipe se l’approprient, une envie d’avancer ensemble émerge, sans que des actions précises et le «comment faire» soient encore identifiés.

Paradoxalement, cela peut générer dans cette phase une baisse des résultats. Eh bien oui, nouveau paradigme, mais pas encore de mode d’emploi, il peut donc y avoir des turbulences.

L’équipe

Plus que l’objectif, l’équipe partage une vision commune.

L’orientation et l’impulsion sont données par le sens et les enjeux de la tâche. Le sens est alors porté par l’équipe qui se l’est approprié, et non plus énoncé par le manager.

Une forme d’intelligence collective est présente, des valeurs propres à cette équipe émergent, on peut ainsi trouver un apprentissage collectif, une capacité d’innovation, un partage des responsabilités.

L’énergie se concentre sur la création et la recherche de sens.

Le groupe réclame les grandes lignes directrices, et de l’autonomie pour les réaliser.

La performance collective prédomine sur la performance individuelle.

Lors des moments collectifs, l’équipe identifie et répartit les tâches, et en réalise un maximum ensemble, ou en sous groupe.

Ainsi, un manager non averti scrutant les tableaux de reportings pourrait s’étonner du faible résultat de certains membres de cette équipe. L’équipe elle même ne s’en offusquera pas, sachant que la contribution de ces membres «à la traine» se situe ailleurs, ou sur du plus long terme. (travail de l’ombre, formation, …)

Le rôle du chef d’ailleurs évolue également: le manager n’est plus forcément le leader, il fait partie intégrante de cette équipe et doit accepter de lâcher son pouvoir.

L’équipe de haute performance

Attention, Nitroglycérine: c’est un état instable.

Lors d’un enjeux ponctuel, l’équipe fait preuve de ressources insoupçonnées.

L’événement est tellement marquant qu’il y a un avant et un après. D’ailleurs, lorsque de nouveaux membres rejoignent cette équipe, il y a «ceux qui y étaient, et ceux qui n’y étaient pas».

J’ai eu ainsi l’occasion de participer à une rénovation de magasin: vous démontez et remontez le magasin sur plusieurs mois, sans le fermer, en gérant à la fois le quotidien et les travaux.

L’énergie et la volonté des équipes les a poussées à se dépasser, à proposer d’elles-même des organisations qu’elles n’auraient peut-être pas accepté en temps normal.

Dans le milieu des sociétés de service informatique, un participant me racontait comment son équipe avait pu se mobiliser: après plusieurs mois de conception, LE projet plante au moment de la livraison au client. Son équipe retrousse alors les manches, s’organise pour faire des roulements, et refait le projet en 3 semaines.

Ce mode de fonctionnement dure le temps du «chantier», demande une énergie forte. Même si la satisfaction est grande, l’équipe haute performance ne peut pas être en pic en permanence. Elle retrouvera son statut d’équipe une fois la tâche accomplie. 

En synthèse:

Le groupe L’équipe
  • Fortement orienté sur l’écoute du leader
  • Responsabilités individuelles
  • Fait les mêmes propositions que celles proposées par l’entreprise
  • Chacun travaille individuellement
  • Fait des réunions courtes, orientées transfert d’information
  • Chacun mesure sa performance en comparant à celle des autres
  • Ne travaille pas ensemble: il discute, décide et répartit les tâches
  • Chacun partage le leadership en fonction du besoin du moment
  • Responsabilités individuelles ET collectives
  • Propose elle même ce qu’elle va délivrer, est impliquée dans les objectifs et la façon de les réaliser
  • Organise des réunions de travail, de réflexion autour des sujets importants
  • Mesure le résultat collectif
  • Travaille ensemble: il discute, décide et réalise ensemble les tâches

courbe équipe

Plusieurs questions peuvent alors se poser:

Faut-il absolument passer d’une étape à l’autre?

Dans quelles situations est il bon d’avoir un équipe?

Dans quelles circonstances un groupe est préférable?

Comment peut-on faire pour franchir les étapes en tant que manager?

Mais cela fera l’objet d’un prochain billet.

Et vous, dans quelle type d’équipe évoluez-vous?

Lire la suite:

Somme d’individus ou équipe haut potentiel (2), repérer les dysfonctionnements

Somme d’individus ou équipe haut potentiel (3) : cerner les attentes ou le début des solutions.


Crédit photo Pixabay libre de droit 

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